Sa figure imposante et la longue tunique qu'il porte le plus souvent ont récemment fleuri un peu partout dans les rues, mais il y a peu, rares étaient les Gambiens qui auraient pu associer un visage à ce nom. Adama Barrow a le même âge que Yahya Jammeh, 51 ans, mais là où l’ex-président brille par son excentricité, lui à la réputation d'être un travailleur acharné et discret.
Et c'est presque par hasard qu'il s'est retrouvé à la tête de la coalition d'opposition. Après qu'Ousainou Darboe, le président de son parti, le Parti démocratique uni (UDP), a été condamné à trois ans de prison cet été, il a été désigné pour le remplacer. Lui était trésorier du parti où il militait depuis 1996 en parallèle d'une carrière dans l'immobilier.
Avant de faire fortune, Adama Barrow a été garde du corps d'un homme d'affaires gambien influent, le beau-père de Dawoda Jawara, l'homme que Yahya Jammeh a renversé en 1994. Il a aussi vécu l'exil dans sa jeunesse, trois ans et demi en Grande-Bretagne. Un épisode semble-t-il douloureux. Il était sans doute loin alors d'imaginer qu'il rentrerait un jour dans l'histoire en l'emportant dans les urnes face à Yahya Jammeh.
La promesse d'un gouvernement d'union
Adama Barrow a voulu faire de sa candidature un symbole du retour à une véritable « unité nationale ». Lorsqu'il été désigné en novembre à la tête de la coalition d'opposition, il a d'ailleurs démissionné de son parti pour se présenter en indépendant et ainsi assumer pleinement son rôle de rassembleur.
Certes il était il y a peu un quasi-inconnu sur la scène publique de son pays et il a fallu que plusieurs leaders de son parti soient emprisonnés pour le porter à la lumière, mais dans une Gambie au comble de l'exaspération après 22 ans de règne de Yahya Jammeh, beaucoup voyaient en sa candidature une menace sérieuse pour l'ex-président. Les Gambiens s'étaient mobilisés comme jamais au cours de sa campagne. Adama Barrow avait même déclaré qu'il n'accepterait pas la défaite.
Celui qui durant des semaines a fustigé les atteintes aux droits de l'homme et la descente aux enfers de l'économie de son pays a promis une fois élu de redresser la Gambie politiquement et économiquement, et de former pour cela un gouvernement d'union de transition qui se donnerait trois ans pour remettre les choses à plat avant d'organiser des élections libres auxquelles il a promis de ne pas se porter candidat.